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Au coeur du Sénégal ... Le Fouta
28 mai 2011

* Les sebbe (sing. ceddo) * A l'origine, les

 

* Les sebbe (sing. ceddo) *

 

 

A l'origine, les sebbe sembleraient avoir été ainsi baptisés par leurs voisins territoriaux peul, ceux-ci voulant, au moyen de cette dénomination, se distinguer de ceux-là. En effet, dans la langue peul comme en pulaar, il est courant que l'homme de teint noir, parlant en outre un dialecte différent, soit par le fait même appelé ceddo. Par exemple, Wolof, Serer et Soninke sont également sebbe dans l'esprit des Peul et Toucouleur, d'où les appellations respectives de sebbe Jolfube, sebbe Sereraabe et sebe Alambe (c'est-à-dire originaires du Galam d'ancienne souveraineté soninké).


Est-ce à dire que les actuels sebbe — fraction comme caste de l'ethnie toucouleur — seraient d'origine Wolof, Serer et Soninke ? En tout cas, certains patronymes de la caste toucouleur des sebbe donnent du poids à cette thèse d'origine, sans toutefois la rendre décisive.
Quoi qu'il en soit, à l'heure actuelle, deux catégories de sebbe doivent être nettement distinguées au Fuuta-Tooro. Tout d'abord les sebbe non toucouleur, qui habitent leurs propres villages : par exemple Nyanga-Nyandaan dans le département de Podor, et Seedo Sebbe dans celui de Matam. Les habitants de ces villages pratiquent un bilinguisme de fait, et communiquent en wolof comme en toucouleur, passant avec aisance du premier au second idiomes, encore que dans cette dernière langue leur accent les trahisse immédiatement comme Wolof.

Cependant, l'on remarque chez les sebbe de cette catégorie une sorte d'assimilation ou adaptation au genre de vie toucouleur, lequel, en tant qu'il est celui de la majorité de la population locale, semble être parvenu à imposer ses techniques, voire son esthétique. Toutefois, le particularisme de ces enclaves wolof au sein du pays toucouleur est encore manifeste, notamment au plan linguistique, sinon dans le domaine matrimonial, où cette minorité sociale forme son propre isolat et n'échange que très exceptionnellement des femmes avec les Toucouleur, pas même avec ses homologues les sebbe haal-pulaaren.


Cette deuxième catégorie, au contraire de la première, est de tradition et langue exclusivement toucouleur, et se confond par conséquent avec la population toucouleur, dont elle forme précisément l'une des castes fondamentales.

En fait, cette caste des sebbe haal-pulaaren est rigoureusement partagée en deux fractions constitutives :

 

  •  les sebbe wurankoobe ou worgankoobe
  • les sebbe kolyaabe

 

Les wurankoobe persévèrent dans leur refus d'être confondus avec les kolyaabe. Ceux-ci seraient arrivés avec Koli Tengela, dont ils auraient été les esclaves attitrés, alors que ceux-là étaient déjà installés depuis fort longtemps et régnaient sur d'importantes portions de l'ancien Tékrour. En tout état de cause, la différence entre ceddo wuranke et ceddo kolyaajo est certainement apparente aujourd'hui encore : non seulement le premier se résout difficilement à donner une épouse au second, mais en outre ils habitent rarement les mêmes villages, Waalalde (Podor) et Jowol (Matam) seront, entre autres, les métropoles des wurankoobe, alors que Ngijilon et Sincu Garba constitueront les capitales réputées des kolyaabe. Car, si les sebbe sont des Toucouleur et vivent donc parmi les Toucouleur, il y a en revanche maints villages qui leur appartiennent spécifiquement, et où ils détiennent depuis toujours le pouvoir temporel, tandis qu'au plan spirituel ils admettent la compétence exclusive des toorobbe, lesquels sont leurs pourvoyeurs traditionnels en marabouts et imans de mosquées.

 

Les sebbe seraient tard venus à l'Islam, et à l'heure actuelle ils passent encore pour peu croyants, bien que tous pratiquants. Le ceddo, dit-on, aurait accepté l'Islam parce que vaincu par ses propagateurs, mais il reste disposé à la moindre occasion à prendre ses distances, notamment en ne respectant pas les prescriptions du culte, ou en les respectant à moitié, c'est-à-dire priant tout de go sans s'être au préalable conformé au rite des ablutions purificatrices. En tout cas, à tort ou à raison ceddo est souvent synonyme de mécréant prolongé, ou d'homme peu enclin à la piété, et qui a estimé préférable de troquer son fusil de guerrier contre les filets et harpons du pêcheur, qu'il est parfois devenu.


Toutefois, d'authentiques sebbe originels se seraient depuis fort longtemps mués en marabouts réputés, donc en toorobbe.

Tel serait notamment le cas de maintes familles du Fouta, et pas des moins illustres. Il est souvent advenu, en effet, que la conversion à l'Islam ait été si complètement achevée que les convertis croyaient devoir renoncer à leur patronyme, car il constituait un lien trop fâcheux avec le passé païen. D'autres convertis, moins rigoristes, conservaient au contraire ce patronyme, néanmoins en renonçant définitivement au paganisme (Wakhli diine wakhlani yettoode).

 

A ces exceptions près — concernant toujours des torodisés de trop longue date pour compter encore au nombre des sebbe — le ceddo est réputé plutôt réfractaire à l'angoisse métaphysique.


Cependant, ceci n'est qu'un élément, et non le moindre du caractère spécifique (ceddaagu) à la caste. Le second élément c'est le courage indomptable, voire la témérité. L'incarnation même du ceddaagu serait la quasi-insensibilité à la douleur physique, parce que le ceddo de qualité serait par définition invulnérable (tunndoowo) au fer, qu'il s'agisse du poignard comme de la balle, ayant à cet égard et dès l'âge tendre reçu le traitement adéquat, que l'on se transmet jalousement de père en fils .


C'est peut-être la raison pour laquelle le ceddo a jadis amplement joué le rôle du soldat de métier, combattant soit pour son propre compte, soit à titre de mercenaire du premier pouvoir venu. Les sebbe semblent avoir fourni à l'origine un certain nombre de souverains : les farba d'avant la dynastie kolyenne, très puissants et redoutés. Par la suite, ils auraient été progressivement déchus de cette position de premier plan, par le pouvoir des Satigi et par le règne maraboutique. Mais, les sebbe n'en jouèrent pas moins le rôle de remparts efficaces contre les invasions maures. Des villages riverains du fleuve Sénégal (Juuwde-JaaBi, Ngijilon, Juuwde-Guuriiki, etc.) portent témoignage à cet égard, parce qu'ils doivent leur établissement à leur situation privilégiée de postes de surveillance et d'interception des rezzou maures. Précisément, les « garnisons » de ces postes s'y sont finalement établies à demeure, à savoir les sebbe, qui sont à l'heure actuelle majoritaires dans lesdits villages.

Plus tard encore, cette même intrépidité des sebbe les désignera tout naturellement à la garde des terres, avec des titres fort variables comme jagaraf, kamalinku, palimpa, farba, maysa, et à la perception des redevances (Boftoowo asakeeje) pour le compte des propriétaires, qui savaient de ce fait pouvoir s'en remettre entièrement à leurs « intendants ». Car, nulle contestation de propriété, ni aucun refus d'acquitter les redevances ne se manifesteront sérieusement, dans la mesure où celui qui est commis à leur répression, le ceddo est un homme dûment connu pour son absence complète d'aménité. C'est une fort mauvaise langue que le ceddo, qui sait par conséquent manier avec brio injures et calomnies, et n'a guère scrupule pour en user publiquement à l'endroit de l'adversaire. Sans compter que le ceddo est forcément habile au jeu de mains, qui serait son métier tout naturel. Il sera alors redouté . de ses concitoyens, et aujourd'hui encore sa turbulence distinctive est bien connue.


Toutefois, le ceddo est une nature fière et noble, et à cet égard, il ne le cède à peu près en rien au tooroodo, auquel il lui arrive bien souvent de contester toute supériorité. Mais il n'exclut pas que sous l'appellation de jagaraf ou mbenyuganna, le ceddo se fasse le courtisan du tooroodo, qui l'emploie alors comme nervi ou garde du corps, ou bien pour l'aboutissement de certaines affaires délicates... Il n'en abdiquera pas pour autant la noblesse d'origine qui lui est reconnue, noblesse très souvent rappelée au moyen de l'anneau d'or qui pend au lobe de son oreille droite — lobe toujours percé chez le ceddo de qualité. Sans compter qu'à l'occasion des soirées de divertissement public où les chanteurs rivalisent de talent, la conduite du ceddo peut dérouter par son héroïsme: à l'audition du gumbala. évocateur de son passé noble et guerrier, le ceddo dégainera son poignard, et à défaut de l'ennemi à occire il se tranchera l'oreille, pour en faire offrande aux artistes. Cette mutilation de soi, si disproportionnée avec son motif apparent, ne serait-elle pas à considérer comme l'illustration continuée de la réputation sociale d'héroïsme ceddo ? Car les sebbe étaient téméraires dès l'adolescence, certains garçons de cette caste procédant jadis à leur propre circoncision, sans la moindre préparation ni le concours d'aucun opérateur.

 

En définitive, que ce soit kolyaabe ou bien wurankoobe, la caste des sebbe haal-pulaaren serait à distinguer au moyen des patronymes suivants:

 

·                                 Aan, Aaw, Baa

·                                 Baal, Baas, Baculy, Bajak, Bannor, Bekere

·                                 Caam, Calaw, Cibilaan, Cimbo, Congaan, Coon, Cooy

·                                 Darame

·                                 Faal, Fay, Fofanna

·                                 Gaajo, Gasamme, Gay, Gey, Golok

·                                 Ja, Jaako, Jaany, Jaawara, Jaginte, Jallo, Jaw, Jeng, Joop

·                                 Kad'isoko, Kamara, Kely, KoBoor, Kontey

·                                 Lekoor, Loo, Lojaan, Loom, Lukwaar, Ly

·                                 Mangaan, Mbac, Mbay, Mbenaat, Mbenyuga, Mbooc

·                                 Meloor

·                                 Ndaw, Ndoom, Ndongo

·                                 Ngalaan, Ngayɗo, Nget, Ngecaan, Ngilaan, Ngom

·                                 Njanoor, Njaay, Njuk

·                                 Nya, Nyang

·                                 Paam

·                                 Saamure, Saar, Sakho, Sal, Sambu, Sawajac, SeeD, Sek, Soh, Sonyaan, Sook, Sumaare, Sy

·                                 Timbo, Toop

·                                 Waad, Wilaan

Il est néanmoins certain que ces quatre-vingt-quatre patronymes n'épuisent pas la caste des sebbe haal-pulaaren, qui portent d'autres noms spécifiques selon les régions du Fouta où ils se trouvent établis.

 

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