- La voix qui s’en va - Ici, là d’où je viens et
- La voix qui s’en va -
Ici, là d’où je viens et là où je vis
La vie est un long récit qui d’habitude ne s’écrit pas
Je déroge à la règle et ma main emprunte un stylo pour habiller mes mots
Mes phrases décousues se couvrent d’un simple pan de tissu
Pour qu’elles puissent rester humbles, à moitié nue
Comme Adam et Eve après avoir mangé le fruit défendu
Mais ma bouche se fait porte-parole d’une ancienne tradition orale
Et ma voix rebelle s’installe sur les bords du fleuve Sénégal
Elle prend cette pirogue, fait ses bagages et s’éloigne petit à petit du rivage
En promettant qu’un jour peut-être elle reviendra visiter son poète
InchAllaH, je suis l’écho de la voix qui s’en va
Les paroles ne viennent pas de moi, je n’ suis qu’un simple messager
Le facteur anonyme qui chaque matin délivre le courrier
Sans savoir si ce qu’il met dans la boite va nous faire rire ou pleurer
Sunugal, Sunugal
Je suis l’écho de la voix qui s’en va
Je suis l’écho de la voix qui s’en va
Sunugal
Au loin, j’aperçois des hommes attendre le lendemain
A l’ombre d’un arbre, le verre de thé à la main
Les langues se délient et l’on entend la voix grave des anciens
Certains disent : le lendemain, seul les Baobabs en seront les témoins
Et d’autres se demandent s’il viendra le soir ou bien au petit matin
Le débat s’installe et les plus jeunes prennent leur place
Chacun ajoute sa parole à la suivante, Ey mi okuma kongol
Même si celle-ci n’a que peu d’importance
Juste pour laisser une trace, déranger le repos du silence
Finalement, les langues fatiguées, le troisième thé achevé
Et la mosquée qui ne cesse d’appeler
Les paroles s’envolent comme un vulgaire bout de papier
Le petit monde reste sur sa faim mais une chose est sur
Que vienne le lendemain, qu’il change notre quotidien
C’est lui dont aujourd’hui nous avons besoin
Sunugal, Sunugal,
Je suis l’écho de la voix qui s’en va
Je suis l’écho de la voix qui s’en va
Sunugal
Au loin, les rires des femmes contrastent avec la dure réalité
Le coq vient tout juste de chanter et c’est déjà l’heure de la corvée
Ici l’eau ne tombe pas des nuages comme dans tous les autres villages
Elle vient d’en bas, d’un puits dont personne ne connaît l’âge
Domaine réservé ou les hommes n’ont pas le droit de cité
Nous sommes fatigués mais il faut bien ramener l’eau dans notre foyer
Alors vêtu de leurs plus beaux habits, c’est un véritable défilé
Qui ferait rougir de jalousie les plus grands couturiers
Les pagnes noués autour des hanches
Et dans leur dos, le dernier-né danse bercé par l’élégance
Les sourires, les rires, et les larmes se côtoient avec dignité
Les rumeurs circulent comme les charrettes un jour de marché
Le monde prend un air efféminé, un peu moins bête et un peu plus coloré
Femme noire, Femme nue, tu recèles de mystères inconnus
Des énigmes que la science n’a toujours pas résolues
Femme noire, Femme nue
Sunugal, Sunugal
Je suis l’écho de la voix qui s’en va
Je suis l’écho de la voix qui s’en va
Sunugal
Au loin, je vois des dos courbés et des fronts sur la poussière
Des voix plaintives qui s’élèvent dans le ciel et s’évaporent dans les airs
Mon soleil indique 5 heures, les paysans font leur prière
Seigneur quel temps fera t’il demain ?
La pluie va t’elle tomber et nos larmes cesser de couler ?
Qu’elle inonde nos plantations, qu’elle fasse reverdir nos champs
Et pourvu que Dieu nous entende
Comme du temps du Prophète, séparer l’ivraie du bon grain
Juste un peu de pain, de quoi nourrir nos femmes et nos bambins
Qui se contente de peu ne manque de rien
Alors les paysans à l’ombre d’un arbre s’assoient calmement
Attendre le lendemain, un verre de thé à la main
Sunugal, Sunugal
Je suis l’écho de la voix qui s’en va
Je suis l’écho de la voix qui s’en va
Sunugal
Puis au loin, j’aperçois marcher le lendemain
Les pas incertains tel l’aveugle qui parfois se trompe de chemin
La peur de ne pas être à la hauteur, c’est une question d’honneur
Mais il sait que c’est à lui maintenant de rentrer sur la scène
De distribuer l’espoir à ceux qui ont de la peine
De rendre hommage à la vieille sagesse Africaine
Le lendemain qui vient, et ma voix qui revient
Je t’avais promis qu’un jour peut-être je reviendrais visiter mon poète
Au loin, le lendemain qui vient
Au loin, ma voix qui revient
Un verre de thé à la main, un verre de thé à la main
Sunugal, Sunugal
Je suis l’écho de la voix qui s’en va
Je suis l’écho de la voix qui s’en va
Sunugal
Par Dawuda David Dupuy